Bonjour à tous,
Je ne sais pas par où commencer. Pour que ce soit plus facile pour moi, je vais parler à la deuxième personne du singulier. Tu seras sûrement étonné de lire ce message, sûrement bien différent des autres mais j’ai besoin d’en parler. Après tout, il y a harcèlement quand il y a une victime et un harceleur. Je n’ai pas été victime d’harcèlement, tu l’as bien compris j’ai « joué » le rôle d’harceleur durant de longues années, parce que oui, pour moi c’était un jeu.
Je vais bientôt avoir 22 ans, j’ai toujours été entourée, la solitude est quelque chose qui me fait peur, j’ai peur de me retrouver seule plus d’une heure. De ce fait, durant toute mon adolescence j’ai eu plein de "potes", des dizaines, vingtaines mais seulement 3 amis sur qui je pouvais vraiment compter et qui sont encore à mes côtés aujourd’hui.
J’ai passé ma primaire dans le privé puis au collège je suis allée dans le public suite à un déménagement. Je n’ai pas mis beaucoup de temps à m’intégrer, j’ai tout de suite compris vers qu'il fallait se tourner, vers qui tu avais intérêt à être ami. Ainsi, de la 6ème à la 3ème je faisais toujours parti du « groupe à intégrer » ou plutôt « le groupe qui se faisait remarquer », tu vois, le genre de groupe détestable au collège mais que personne n'ose contredire. J’aimais vraiment ma vie mais dans ce groupe on ne m’écoutait pas vraiment alors j’ai voulu leur montrer que moi aussi on doit me respecter.
J’ai commencé à me moquer d’une fille de ma classe, évidemment j’ai choisi la plus timide, la plus vulnérable. Au début c’était de « simples » remarques sur ses vêtements, puis sur son physique puis des objets ont commencé à voler en sa direction... elle en a parlé à la prof principale qui n’a pas réagit alors pour la punir c’était des insultes, des bousculades puis plein de gens faisaient comme moi et ça ne s’arrêtait pas à la grille de l’école, ça continuait sur skyblog, msn, sms... j’étais tellement heureuse d’être respectée, d’être la personne que tout le collège craint alors j’ai continué avec d’autres élèves et ce, jusqu’à la fin du collège.
Des parents sont venus me voir à la sortie, mais j’étais entourée de ma bande de copains, je me sentais tellement puissante sachant très bien que le collège ne réagissait pas. Mes parents n'étaient au courant de rien. Bien que le collège soit au courant de mes agissements, il n'a jamais jugé bon de convoquer mes parents. Je me sentais puissante.
Jusqu’au jour où mes parents ont reçu un coup de téléphone : plusieurs personnes ont été porter plainte contre moi. J’en voulais tellement aux collégiens qui ont porté plainte, pour moi c’était un jeu qui ne regardait personne d’autre. Je n’ai pas compris l’ampleur de mes erreurs, de mes conneries plutôt. Il n’y a eu aucune suite donnée.
Brevet en poche, mes parents m’ont inscrit dans un lycée privé où les gens me connaissaient mais pas de la même façon. On me pointait du doigt pour ce que j’ai fait. On a eu des interventions contre le harcèlement et c’est seulement à ce moment là que j’ai compris. Mais j’ai seulement compris que ce que j’ai fait n’était pas bien. Je n’ai pas compris les conséquences physiques et psychologiques de la victime.
Puis le 30 octobre 2014, j’étais en vacances chez une amie quand mon père m’appelle pour m’annoncer le décès de ma cousine. Ma cousine, mon sang, ma vie. Elle s’est suicidée suite à un harcèlement subi en primaire alors qu’elle était désormais en 2de. Elle ne s’en était jamais remis et c’est à ce moment là que j’ai repensé aux victimes, à toutes celles qui ont été victimes de mes conneries, de mes imbécilités. J’ai enfin compris ce qu’un simple jeu pour nous, peut représenter pour elles. J’ai compris qu’une simple insulte pour nous, est bien plus pour la victime. J’ai compris que nous n’avons pas le droit de juger les gens, pas le droit de leur faire du mal. Je me suis détestée pour la 1ere fois de ma vie. J’en dormais plus, je me faisais vomir tellement je me dégoûtais. Aujourd’hui j’aimerai tant lutter contre le harcèlement scolaire, je ne sais pas comment m’y prendre mais je dois aider les victimes, je ne peux pas croiser mes bras.
Autre chose, il faut arrêter de dire que le harceleur a aussi besoin d’aide. Que s'il agit comme ça, c'est qu'il n'est pas bien dans sa peau. Non. La seule victime c’est la personne qui a croisé son chemin, elle, elle doit se faire aider. L’harceleur lui, doit se faire punir et ensuite éventuellement expliquer son geste.
Voilà, pour essayer d’exister j’ai gâché l’existence de personnes innocentes et aujourd’hui encore je ne me pardonne pas.
Merci Jérémy d’avoir témoigné, en espérant que ça ne fasse pas réagir uniquement les victimes...
J'envoie tout mon courage aux personnes ayant subis ou subissant encore aujourd'hui un harcèlement. Vous êtes la victime, il est le coupable. Parlez !
Force !